L'assassin habite au 21 marque le début de Henri-George Clouzot qui a marqué la Septième Art et a toujours été très lié avec le roman policier. Il a été à la fois le cinéaste et le réalisateur de ce film et a très étroitement travaillé avec S.A Steeman ce qui nous pousse à nous demander pourquoi le film est si différent du roman...
Ce film de 1942, c'est-à-dire sous l'Occupation a donc été realisé dans une période ou le cinéma français est très fertile et surtout très révélateur de ce qui règnait dans les esprits des Français de l'époque. N'oublions pas que le cinéma est aussi un moyen d'expression.À cette époque-là, le cinéma pouvait avoir plusieurs caractéristiques, il pouvait servir de propagande (on peut considérer les films allemands imposés aux populations françaises), les films qui cherchent à diffuser des idées de libération meme si cela était difficile car le cinéma, comme tout le reste, était largement controlé par les nazis. De plus, le genre qui nous intéresse, le roman policier, était très en vogue car il représentait l'atmosphère morose et douteuse qui régnait alors dans toute l'Europe. On trouve aussi des réalisateurs qui s'opposent à ce principe et qui cherchaient à faire des comédies (exemple : Premier Rendez-vous avec Danielle Darrieux) pour essayer, le temps d'un film, de faire oublier l'occupation, la faim, la guerre,etc. Si on se place sur l'échelle internationale, on retrouve des films comme ceux d'Hitchcock (exemples : Suspicion, 1941/ Shadow of A Doubt, 1943) comparables à des adaptations de Georges Simenon (La Main du diable, Le Val d'Enfer de Maurice Tournier) qui sont largement comparables aux oeuvres de Clouzot de part leur esthétique sombre et dramatique.Il serait pertinent de noter que la firme la plus connue de l'époque, le Continental était sous direction nazie mais a permis de créer des oeuvres de qualité qui ont contribué à la diffusion d'idées qui faisaient appel à l'intégrité des Français. En effet, les réalisateurs français devaient faire concurrence au marché américain et en étant dominés par les nazis! Paradoxalement, cette époque a vu naitre plus de 200 films de qualité.
En effet, les années 1941-1944 marquent l'étonnante résurrection de la production cinématographique. La France étant divisée en deux, c'est à Vichy que les premières productions commencèrent. Mais tandis qu'on forgeait les instruments de la renaissance cinématographique, les Allemands faisaient tout pour empecher celle-ci et employaient les meilleurs ressources artistiques françaises à leur profit. Avec la création de la Continental Films le 3 Octobre 1940, meme si elle était sous direction nazie, il fut possible pour les cinéastes français de se remettre au travail dans la zone occupée puis eurent le droit de se remettre au travail dans les studios parisiens..
L'année 1942 est la plus belle de l'Occupation avec un bond à soixante-dix-huit films. Parmi les meilleurs titres de la Continental on note évidemment L'assassin habite au 21 , La main du diable et surtout de nombreux metteurs en scène comme Marcel Carné, Maurice Tourneur, André Cayatte mais aussi celui qui nous intéresse, Henri-Georges Clouzot, qui fut directeur artistique de la Continental avant de passer à la réalisation d'un nouveau film L'assassin habite au 21 qui fut d'un niveau artistique éclatant.
Malgré de lourdes peines qui furent infligées aux cinéastes français, par exemple, Clouzot fut interdit à vie puis finalement pour deux ans, les années noires de l'Occupation comptèrent parmi les plus lucratives du cinéma français. Deux cent vingt longs-métrages furent tournés durant la période et aussitot diffusés en salle (sauf exceptions) ce qui parait très étonnant compte tenu de la gravité de la situation politique de la France ...
10 mai 2006
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